« Cinquante et une nuances de gris au dessus de l’Élysée », pastiche du livre de Valérie Trierweiler :
« Merci pour ce moment » est un essai autobiographique de Valérie Trierweiler, publié le 4 septembre 2014..., relatant sa vie privée avec le président de la République française, François Hollande. (Wikipédia)
... « plus gros démarrage depuis cinq ans », un démarrage trois fois plus fort que "50 nuances de Grey", le best-seller des cinq dernières années. (La Fnac)
Les aventures de François Noland :
C'était la rentrée, celle des enfants et des nouveaux ministres. L'été avait été profitable pour les français, mais pas pour le gouvernement. Le Président les voyait s'amonceler, les gros nuages noirs au dessus de sa tête. Il affichait un sourire crispé entre ses deux Manuel de classe : Valls et Macron. Et puis Valoche est arrivée pour remettre les montres à l'heure sur le perron de l’Élysée :
_ Salaud, tu m'as laissée tomber comme une malpropre ! Merci pour ce « moment »...
_ Oui, un grand moment pour nous deux, mais un petit moment pour l'humanité... hein hein... Restons humble ! François espérait sauver la photo avec son humour habituel.
_ Fumier, je vais te pourrir la rentrée, fais moi confiance !
_ Mais Valoche, enfin, excusez-moi messieurs dames, viens dans mon bureau... chut... Je ne sais pas résister à une belle femme ! Tu m'as conquis, j'tadore...
Voilà l'erreur de base : celle de s'acoquiner avec le show-business, ou pire encore, avec une journaliste trop bavarde... Julie G. eut été moins garce et Ségolène moins acide dans cet exercice de la femme répudiée.
_ C'est pas compliqué, fit la mégère, j'arrive, je te siffle et tu rappliques... Alors maintenant, baise-moi !
_ Te baiser... le front ? Hein... Bon d'accord, j'ai cinq minutes avant le conseil des ministres, viens par ici !
Elle ouvrit la porte du bureau présidentiel d'un coup de fesse et la referma d'un coup de talon.
_ Mais c'est qui encore celle-là sur la cheminée ? S'étonna Valérie.
_ C'est le buste de Laetitia Casta, ma Marianne préférée ! J'appréciais de le caresser après ton départ mais j'ai trouvé bien mieux : les soirs de blues je vais traîner au Louvre... Tu vois, c'est ça l'exercice du haut commandement, quand tant de solitude nous pèse... Alors, la Victoire de Samothrace me réconcilie avec les femmes. En plus, comme elle n'a pas de tête, je me fous d'être surpris en flagrant délit... Je suis un hédoniste insomniaque !
_ Quoi ? Tu vas au Louvre en scooter la nuit, c'est nouveau, et tu tripotes la Casta en rêve ? T'es qu'un pauvre jouisseur, un malade. Tu chercherais à baiser au Musée Grévin... Écoute, Il faut que t'arrêtes de m'envoyer des messages d'amour, François ! N'as-tu rien d'autre à faire ?
_ Non, je suis un homme d'ordre et de réserve, classieux et sans autres prétentions que de remplir mon devoir... Comme moi Napoléon avait des petits tiroirs plein la tête qu'il ouvrait et refermait à volonté pour traiter des affaires de la République. Cela permet de ranger, de classer, de hiérarchiser, de gérer les priorités, de relativiser aussi... Sais-tu que Napoléon appelait chacun de ses grognards par son nom sans jamais hésiter ? Moi, j'ai une attention particulière pour chacune de mes maîtresses. Certes, je ne peux pas plaire à tout le monde, mais je ne suis pas un mufle, et je veille à te garder une place dans mon cœur, malgré mes responsabilités qui sont immenses !
_ Que veux-tu me dire François ? Que je ne suis rien pour toi qu'un numéro, une paire de chaussettes dans un tiroir peut-être, ou bien un accident de parcours dans ta vie ? Sais-tu que j'écris un livre sur toi ? Tu commences à t'inquiéter peut-être !
_ Parle et je suis à toi, fit-il en l'acculant sur une bergère. Je suis un homme de bien et j'éprouve de l'empathie pour tous mes concitoyens . J'aime le peuple quoi ! Quand il pleut, je tousse avec lui et quand les Français gagnent au foot, je me réjouis de leur victoire. Maintenant, Valoche, finissons en avec ce gros dossier brûlant entre nous !
_ Tricheur, menteur, tu n'aimes que toi... Non, non, tu n'es qu'un monstre d'orgueil ! Elle le défiait, les yeux dans les yeux et les seins au balcon. Et c'est qui celui là encore, le petit jeune qui t'attends comme un chien de faïence derrière la porte ? Tu ne serais pas en train de virer homo ? Un mignon pour le « Roi de France », ce serait un scoop ! Avoue mon cochon...
_ N'essaie pas de me prendre aux mots, Valoche, c'est mon nouveau ministre de l’Économie, un esprit brillantissime et nous avons besoin de lui pour résoudre la crise... Je le reçois souvent dans mes bureaux : ensemble nous refaisons le monde et nous annulons la dette publique. En plus, c'est un énarque... J'aime sa belle intelligence et il apprécie mon humour... Allez, sois pas jalouse... une femme ne peut pas comprendre ces choses là ! Ah, si seulement tu m'avais donné un héritier... Comment vais-je assurer la descendance dans mon harem maintenant ?
_ Mais tu te prends pour qui... Mitterrand, c'est ça ? Là , je crois que j'ai tiré le gros lot : c'est 500 mille exemplaires garantis ! Je vais t'humilier... Finalement, tu es bien pire que le petit Sarko, un beau parleur et un lâche, monsieur "Moi-je"... Non, je n'oublie rien moi non plus : Ils vont tout connaître de toi ! Fit la maîtresse-femme en lui léchouillant le lobe de l'oreille.
_ Tout quoi ? Je n'ai jamais livré de secrets d' État sur notre couche, il me semble ?
_ Si... Tu n'aimes pas les pauvres !
_ C'est pas vrai ! Je n'ai rien contre eux. Je n'aime pas les pleurnicheries et je n'aime pas l'échec, voilà tout. Mais je ne permettrai pas qu'on mette en doute ma morale et mon honneur, fit-il en ôtant ses lunettes.
_ Ah bon, c'est comme ça ? D'accord, de toutes les façons c'est fini entre nous... Tu l'as annoncé toi-même en 17 mots à l'AFP ! Si tu veux des descendants de tes femmes illégitimes, François, tu peux aller tirer gratis à la banque du sperme...
_ « Descendants » vaut mieux que des « sans-dents » ! Et pourquoi pas des sans-culottes aussi ? J'ai horreur de me mélanger au peuple, tu le sais, mais si en plus je devais fréquenter la banque du sperme et les bordels, entre les pauvres édentés et les résidus de capotes... Tu me prends pour Dominique de Saint Kahn ? Allons, n'oublie pas que je t'ai sortie de la plèbe, et avec ta famille, c'était pas du gâteau... Je t'ai offert un destin de Première Dame de France ! Pense que ton nom sera cité dans tous les manuels d'histoire... et merci qui ? Alors je t'en supplie, ne fait pas de bêtises, hein, fit-il en dégainant... La NSA m'a averti que tu préparais un coup fourré à ta façon ?
Valoche se retourna sur la bergère, la tête sur le dossier pour lui offrir ses fesses. Il lui retroussa la jupe. Elle s'empourpra méchamment pendant la fessée, brève mais efficace.
_ J'espère que j'aurai droit aux indemnités de licenciement ? Lança-t-elle enfin.
_ Pour services rendus à la nation ? Voyons, Valoche, je ne peux pas rémunérer des emplois fictifs, comme Chirac à la Mairie de Paris, hein ?
_ Et bien, Je vais te la réécrire, ton HISTOIRE de FRANCE ! Insinua-t-elle. Pas la peine de te représenter aux prochaines érections !
_ Élection, é-lec-tion ! insista le Président, ne massacre pas les mots, c'est agaçant ! Un peu de saine colère avait pour effet de l’exciter avant le conseil des ministres, car c'était là son côté sadomaso. Endurci à point, il se mit à la buriner férocement, en bon missionnaire.
_ Si tu fais un scandale, tu vas tuer tout ce qu'il y a de plus beau entre nous ! Ajouta-t-il entre deux ahanements. Mais toute cette haine de femme le galvanisait. N'avait-il pas continué de la twitter toute la semaine ? Et elle revenait s'offrir à lui sans pudeur...
_ Tu parles trop François, mais tu devines que ta carrière est finie... Profites-en pour mater une dernière fois mon derrière ! Honneur aux vaincus.
_ Aah, ton divin cul ! Gloussa le pépère en rut. Vous êtes bien « toutes les mêmes »... Tu l'aimes bien, Stromé... Stromae ? Il me rappelle Jacques Brel mais en plus finaud. « Ne me quitteu paaa... ». Quel looser celui là !
Faut dire que Noland en avait fait, des grosses boulettes . Plus d'un militant revanchard attendait de le déboulonner de son socle à la façon de Lénine sur la Place Rouge. Indifférent, le président des Français avait l'art de botter en touche et de recommencer, comme pour ce nouveau gouvernement déjà condamné à l'échec, sacrifié sur l'hôtel du "Moi-Président". Dernièrement, n'avait-il pas offert 41 milliards au patronat, c'était son côté « new liberal », au lieu d'utiliser ces fonds sans fonds pour la formation continue des "sans-dents", les "sans-travail" et « sans-mutuelle » de la Ve République... Cinq millions de chômeurs sans qualification qu'il accusait déjà d'être des profiteurs du régime... Fini, couic ! Et puis, n'avait-il pas offert précédemment une grosse ristourne aux restaurateurs, et toujours sans contrepartie aucune ? Ces cadeaux favoriseraient peut-être l'investissement mais pas l'embauche. Et alors ? Depuis ces dernières décisions, Bercy était contraint de surtaxer les retraités, les veuves, de stigmatiser les fonctionnaires, d'inquiéter les étudiants et bientôt d'augmenter la TVA, mais sans jamais menacer les profits des multinationales, les rentes des plus fortunés, l'argent sale des paradis fiscaux et la spéculation boursière.
L'impérialisme américain gagnait par ce biais sur tous les tableaux, avec l'aide inespérée de notre Président socialiste : les universités des USA le feraient sûrement « Docteur honoris causa » pour toutes ses concessions au libéralisme pur et dur anglo-saxon. Mais Noland n'avait pas d'états d'âme : il fallait coûte que coûte trouver une locomotive pour raccrocher les wagons, une Amérique victorieuse ! Et puis le Prix Nobel reviendrait sans conteste à Jean-Claude Junker, le nouveau président de la Commission, qui offrait la direction des finances européennes aux Anglais (des ultralibéraux anti-communautaires qui font chanter l'Europe, de la graine de corsaire !) pour remplir in fine les coffres forts de la City et de Wall Street, soit 300 milliards d'euros d'investissements à la clef.
Pour donner le change, François Noland alignait joyeusement son nouveau gouvernement comme un équipage d'aviron sur la Tamise, pour une « Boat Race » amicale entre les Anglais et les Allemands. Avec Macron de Rothschild à la barre, tous ces faux-frères viraient déjà fièrement à droite. Montebourg était tombé à l'eau, l'imprudent, sous les applaudissements de Lord Cameron et Dame Merkel.
_ Quoi, les chômeurs en France ? Pas besoin de faire l'ENA pour faire la plonge ! Ils se formeront sur le tas. Et puis "Master Chef", "Top Chef" et tutti quanti, c'est bien pour eux, non ? Je te l'avoue franchement, Valoche, je ne comprends pas pourquoi ils refusent 350 000 emplois qualifiés ? Les ingrats, les gueux.
La belle pressa les fesses pour faire monter la sauce, car les 5 minutes prévues s'étaient écoulées et Macron tambourinait derrière la porte, inquiet de ce ramdam d'enfer dans le bureau du patron. Heureusement, la porte était verrouillée de l'intérieur.
_ Ne sois pas condescendant, mon gros. Ils ne sont pas formés pour ça tes cinq millions de chômeurs... Tu veux des infirmiers, des ingénieurs, des commerciaux, des chefs de projets, des analystes-programmeurs ou des ouvriers spécialisés ? Faut pas rêver ! Maintenant, ce sera plus facile d'aller les débaucher à l'étranger. D'ailleurs, la moitié de tes chômeurs parle à peine le français et l'autre moitié, ce sont des vieux cons comme toi qu'il faut recycler !
_ Senior... des vieux à cinquante ans à peine ! Et moi, je fais quoi à cet âge là ? Je tricote des napperons ? Écoute-moi bien, Cosette, y'a pas besoin de faire l'ENA ou Sciences-Po pour faire poissonnier, ou alors l'ENA serait tombée bien bas... Mon cabillaud, qui veut mon cabillaud ! C'est pas compliqué, non ! En plus ils ont les cours du soir et l'Alliance Française, alors ils vont pas me chier dans les bottes, ces ploucs ! Mais j'avoue que seulement 13 pour cent d'opinions favorables... Après tout le mal que je me suis donné pour eux... Ah... Je sens que ça viens... Si c'est ça le peuple ? Non, non, je ne suis pas déçu... Mais Obama s'inquiète pour moi : si je tombe en dessous de dix pour cent, ça pue la révolution française... Il faudra m'exfiltrer de l’Élysée, comme Louis XVI en 1793... Tu remarqueras que si Marie-Antoinette avait trahi le Roi pour s'enfuir en Autriche, il serait passé à la guillotine deux ans plus tôt. C'est pas ça que tu veux pour moi, j'espère ? Et pour quel résultat : l'extrême droite, la Terreur ?
_ Ouuui, ouuui... Connard, si Marie-Antoinette avait ouvert sa gueule plus tôt, elle aurait sauvé sa tête ! Moi, mon avenir est devant, fit la belle en comprimant le chibre victorieux.
_ Mais Valoche, si toi aussi tu m'abandonnes, je ferai quoi en exil ? Des colliers de nouilles au Fort de Brégançon, hein ?
Réduit à cette extrémité et se prenant pour Napoléon à Sainte-Hélène, il exulta brièvement... Et puis il la chassa brutalement comme à son habitude de son bureau, d'une tape sur la croupe pour la renvoyer à l'étable. Elle en fut atterrée !
_ Allez, remets ta ZUP, cendrillon ! J'ai d'autres souris à fouetter... Dépêche-toi, on voit tout le bazar et c'est pas jojo, on dirait une vieille jument !
_ Gougeât, c'est la dernière fois ! C'est le mini-short de la petite Belkaça à l’Éducation nationale qui te fait courir maintenant ? Fit-elle vexée en se rhabillant sans le regarder, les bas déchirés et les genoux rougis.
_ Je ne te permets pas, petite cochonne ! Tu peux me malaxer les boulettes autant que tu veux, mais pas un mot sur mes ministres ! C'est vrai qu'elle me rappelle ma nourrice... Bon, y'a machin qui m'attends à la porte... désolé... S'excusa le Président en remontant sa braguette, avant d'ouvrir la porte d'une poigne de fer.
Qu'il était loin, le temps des baisers sur la bouche devant les photographes ! Elle déplia son string d'un doigt expert au niveau de l'entrejambe puis tira sur sa jupe par dessus avant de s'éclipser. Et ce qui fut dit fut fait : plus qu'un soufflet présidentiel, Valérie devenait par réaction la championne toutes catégories des chroniqueuses perverses et du décalottage de vieux garçons. N'avait-elle pas noté ces dernières années ses déceptions et son dégoût de vivre en concubinage avec Flamby (la crème de la crème) dans son journal intime ? Elle avait même conservé quelques échantillons du président « en fonction » sur sa fausse robe de mariée en strass de chez Dior... Beurk ! Mieux, elle recrachait pieusement la pipe du matin derrière les portes des palaces qui accueillaient leurs amours illégitimes, déposant ici et là des preuves au cas où François viendrait à la renier... Aujourd'hui, le piège se refermait. Il ne restait plus qu'à expédier les cahiers vengeurs à l'ennemi teuton, avec les dernières confidences et le timbre collé au sperme présidentiel depuis sa motte humide. Elle ferait éclater la vengeance d'une Mata Hari « poste mortem » et vengerait du même coup toutes les femmes trahies : pour Marilyn Monroe et pour toutes les autres !
Elle riait aux éclats en relisant ses aventures, car les temps étaient propices à ce déballage. D'abord elle s'éloignerait un peu de la scène médiatique... Ensuite elle réapparaîtrait pour relancer la presse. Valérie espérait atteindre le million d'exemplaires vendus, même si les rats du prix Goncourt, les Grasset, les Gallimard et tous les autres parlaient d'un "non-livre" : bien sûr, elle coupait l'herbe sous les pieds de Delphine Botox ! Mais Valoche balançait tout, avec son ventre et avec ses tripes, accouchant pour ainsi dire d'un enfant illégitime, tombé comme une grosse bouse inattendue sur les ors de la république... et merde pour eux !
En voilà des secrets d’histoire et d'alcôve, me direz vous... François Noland, le Grand Condé-Sans-Dents, bafoué par une courtisane fielleuse ?
Cependant notre bon Président, aimable en vrai quoique cassant, tentait de se réinventer tous les jours... N'avait-il pas mis au point la formule du « non-mariage pour tous », le contrat anti-matrimonial qui conduisait à la solitude présidentielle entre autre, en prenant à contre-pied tous ses prédécesseurs ? Ah, rien de plus veule qu'un Sarkozy en train de pouponner ! Des petits enfants « sans-dents » le poursuivaient dans ses pires cauchemars.
L'officier du désespoir éructa dans la salle des divorces de la mairie :
_ Valérie, et toi... François, je vous déclare libres et irréconciliables, seuls jusqu'à ce que la mort vous réunisse en enfer au milieu du magma primitif ! Vous pouvez à présent répudier votre partenaire et copuler comme bon vous semble mais séparément.
Valoche se plaignait d'avoir offert ses meilleures années à un quinquagénaire méprisant, elle qui maintenant se rêvait en « cougar ». Fleur bleue, elle avait été la plus grande fan de François au début de leur relation, quand elle consignait toutes leurs « aventures » dans une « fanfiction ». Mais en essayant de s'intégrer dans l'entourage des grandes écoles, elle s'était heurtée aux codes obscurs de la méritocratie, une caste en soi.
Dans son livre, elle pensait offrir à ses lecteurs un journalisme ménager autant que « pote-agé » : n'ayant pas juré fidélité à ce vieux con, Valérie pouvait se permettre d'écrire le manuel de « La parfaite salope », histoire de faire fortune. Vive le mariage à l'envers ! Non seulement elle pariait sur la baisse de Noland dans les sondages mais elle allait le labourer comme une folle jusqu'à le réduire en poussière pour combler son féminisme décadent. Du même coup, elle s'enrichirait considérablement : c'était son seul moyen de se refaire, et sur son dos ! De cette économie profiteuse, la traîtresse ferait bien des émules à venir.
Ainsi ses amours se consumaient dans cette tragédie post-moderne livrée à point nommé, une OPA en prose offerte au voyeurisme, un opéra de mauvaise qualité, une resucée de « La Traviata » en plus désespérée. Pour sûr, c'était pas rendre service à la Ve République que de donner cet exemple là, mais Valoche ne voulait pas mourir seule et ruinée dans le dernier acte.
Entre l’Élysée et Matignon, une flopée d'énarques se penchaient déjà sur une VIe république, mais uniquement sur Internet : toutes nos frontières et nos préjugés devaient tomber le même jour (à la façon du Mur de Berlin) pour livrer la France à la libre concurrence. Les flingueurs de Noland avaient pour mission non seulement de réformer notre pays en profondeur mais aussi d'exploser les anciens dogmes, y compris celui d'une France champêtre et innocente autour de sa famille unie et de son église. Ils avaient reçu l'ordre de la CIA, en langage fleuri, de dynamiter « la petite maison dans la prairie » et d'abattre « tous les bisons », de faire passer les drogues et les iphones pour mieux nous asservir, de démanteler nos industries locales, d'imposer le « Traité de libre échange transatlantique », de couper les relations avec la Russie, de réduire notre population en esclavage au service de la Finance Internationale, de multiplier les effets des gaz de serre pour faire fondre la banquise, et finalement d'ouvrir le passage du Pôle Nord à leurs porte-conteneurs remplis de Roundup, d'OGM, de poulets javellisés et de bœuf aux hormones. Déjà, nos ordinateurs vérolés faisaient des milliards d'opérations outre-atlantique à notre insu et livraient au détour nos derniers secrets.
Notre bon sens national, issu du cartésianisme, était requalifié d'anti-libéralisme et de protectionnisme honteux par les analystes politiques et les économistes universitaires. Ah, les vendus ! Ainsi ballottée, la France oscillait entre l'énarchie et la ploutocratie.
Dans le secret de ses lectures nocturnes, François Noland s'étonnait de tant de détails sur sa propre « médiocrité ». Ne l'avait-il pas élue pour sa candeur de petite fille ? Une simple vengeance n'aurait pas dépassé cent pages en petits chapitres, mais il découvrait dans « Merci pour ce moment » la volonté ancienne de faire œuvre, soit une peinture minutieuse de ses habitudes et de son milieu. Valérie y démontrait tous les tics des écoles de journalisme : l’obsession du détail, les formules lapidaires pour dissimuler son ignorance, la victimisation et la prétention littéraire. Et lui n'avait rien vu venir quand elle se penchait sur son journal intime. Elle jouait un personnage dans cette auto-fiction : une espèce d'Emma Bovary qui raconterait sa vie malheureuse à un certain monsieur Flaubert, nègre de son état. De toute évidence, Valoche s'était dédoublée traîtreusement toutes ces années passées pour amorcer la carrière ambitieuse d'une écrivaine de renom. Et nul doute qu'elle réitérerait son exploit.
Cependant, dans le cas présent, sa vision semblait biaisée par le ressentiment : était-il possible qu'elle eût fréquenté un homme vraiment « hors du commun » se dissimulant sous un aspect débonnaire ? Malgré leur promiscuité, finalement, elle ignorait tout de François Noland car lui -même se rêvait plutôt comme le Julien Sorel de Stendhal. Doué par la nature autant que par le travail, il méprisait surtout les incompétents et les arrivistes sans scrupules.
À l'heure de jouir, Valérie n'avait fait qu'effleurer le monstre, sans jamais entrer dans sa peau. Ignorante des arcanes du pouvoir, son livre n'était qu'un vaudeville qui se jouait sur fond de décorum élyséen, « quand une femme ordinaire s'éprend d'un homme ordinaire qui devient un président ordinaire, à sa grande déception. Son faux prince charmant l'a répudiée. Alors elle est prise d'une rage extraordinaire et elle vire très mal, finissant pétroleuse façon Brigitte Bardot ». Pour tout dire, c'était bien elle l'héroïne à l’Élysée et lui le dindon de la farce.
_ En considérant l'Amérique dirigiste, l'Allemagne dominatrice, l'Angleterre opportuniste et l'Europe tellement exigeante, à quoi sert mon dernier gouvernement ? Nous perdons l'initiative dans tous les domaines et je passe pour faible et indécis ! Mais comment leur dire : le socialisme d'état n'est pas viable, ce n'est qu'un mensonge politique pour se faire élire... et Valoche qui me mitraille à brûle-pourpoint : mais dans quel pays sommes nous ? Se désespérait François Noland en caressant tristement la victoire de Samothrace, les lunettes embuées et le nez rouge.
Si les caméras avaient saisi cet instant là, il aurait acquis sa dimension comique et découvert d'un coup son « clown intérieur ». Sur les photos habituelles, il n'était qu'un homme préoccupé dans un habit froissé. Il lui manquait sans le savoir l'amour inconditionnel d'un chien pour égayer sa vie.
Pendant 9 ans, Valoche l'avait accompagné dans son ascension jusqu'à la présidence. Elle avait repoussé une à une toutes ses concurrentes, sauf Ségolène bien sûr. Rejetée, elle avait alors expérimenté un manque brutal : son livre était de fait un mini coup d'état pour reprendre le pouvoir et devenir maîtresse de son destin. Par ce jeu de dupes, elle retrouvait un rôle central dans l'histoire de François Noland, mais aussi dans celle de la République. Elle devenait même la référence ultime en la matière et elle éclipsait Ségolène, insignifiante tout ce temps. D'ailleurs, les journalistes ne juraient plus que par Valérie, mais s'empêtraient facilement dans toutes ses révélations. En bref, c'était impossible pour un biographe, un agiographe, un historien ou un scénariste d'écrire sur cette période de l'histoire de la présidence sans s'en référer à elle. À moins qu'ils ne la dissolvent dans un bain d'acide pour finir ? Déjà, elle s'agaçait de la titraille à propos de son livre, du style : « Une histoire d'amour à l'envers, aussi impudique qu'un cunnilingus ». Son talent n'était pas pris en considération, ou alors pour écrire un tome chez Arlequin. Elle espérait vivement que les Américains lui achètent les droits pour sortir un biopic bien ficelé plutôt qu'une mauvaise comédie sentimentale à la française.
Ainsi révélée, leur vie commune s'éparpillait « façon puzzle » ici et là dans la mémoire collective et sur le Net, et tous ces petits riens qui agrègent le couple. Hélas, personne ne criait au chef-d’œuvre. Le sujet était trop polémique, trop chaud pour l'instant. On y faisait référence sans l'avoir lu, on empruntait les mêmes citations, on y examinait le Président par le petit bout de la lorgnette : quelques uns exigeaient même sa démission. Mieux valait en rire qu'en pleurer !