Le temps de la PAIX devra venir quand Poutine, qui est l'initiateur de la guerre en Ukraine, aura capitalisé suffisamment d'avantages terrestres: des territoires gagnés et des positions inexpugnables.
Lors de sa première rencontre de conciliation avec le président Macron, Poutine s'est présenté comme le maître du jeu : qu'avez vous à m'offrir? La table immense était vide, là où tous les dirigeants de poids auraient dû venir s'assoir : l'Ukraine et les pays de l'Est, les États-Unis et ses alliés anglo-saxons mais aussi la Turquie, l'Inde, la Chine, le Brésil, le Japon, Israël, l'Allemagne et chacun des 27 pays de l'Union européenne comptant comme autant de voix.
Certains commentateurs ont expliqué que MACRON était venu les mains vides comme le petit soldat des États-Unis et qu'il avait saboté sciemment les pourparlers de paix. Mais c'est faux: Macron n'est pas venu capituler au nom de l'Ukraine mais avec le mandat représentatif de tous les pays de l'Union Européenne et la volonté d'ouvrir un dialogue conciliant avant d'envisager d'autres mesures plus agressives, celle que Poutine allait bientôt découvrir - tout en sachant que Joe BIDEN renonçait définitivement à toute intervention militaire. Et puisque MACRON se définit lui-même comme un humaniste, comment faire face à un terroriste sans scrupules?
Sur la photo, Poutine tel un sphinx garde une posture ferme avec les bras croisés, les coudes posés sur la table quand Macron essaye de lui donner le change, les bras ouverts en avant à l'extrême opposé de cette table monumentale. Ce sont les prémisses d'un débat devant annoncer d'autres réunions et des négociations âpres, mais Macron ne fait pas le poids dans la discussion qui tourne au monologue menaçant avec une liste d'exigences que notre "petit factotum" devra transmettre à d'autres plus puissants.
Cette "fin de non-recevoir" de Poutine est la négation de l'Union Européenne qu'il veut mettre à mal en isolant chacune de ses composantes. De plus, Poutine exige une capitulation du reste du monde devant ses exigences, une reconnaissance internationale de ses gains précédents et une dissolution de toutes les ententes stratégiques d'une défense commune en Europe pouvant inclure un jour ou l'autre l'Ukraine et l'Europe de l'Est en général: le pays comme les anciennes colonies slaves sont russes qui rétablissent l'ancienne URSS dans ses frontières, le gouvernement ukrainiens doit abdiquer et les armées russes pourront y pénétrer sans tirer un seul coup de feu, comme en 2014 au moment d'annexer la Crimée. C'est le traité de paix qu'il faut signer d'un commun accord pour stopper la guerre.
La mise en scène de Poutine est un coup de bluff magistral qui précède un coup de force tout aussi magistral puisque dans la nuit du 24 février, la Russie envahit l'Ukraine en bombardant tous les points stratégiques identifiés par ses espions et ses mercenaires en patrouille sur le territoire ennemi.
Tous les petits chefs de partis en France, qui sont autant de candidats pour succeder à la présidence française, accablent Macron pour son échec à convaincre Poutine et son refus de céder à des exigences tellement simples du dictateur qu'elles s'énumèrent "sur trois doigts de la main". Ils voient Poutine comme un lion acculé, CONTRAINT À LA GUERRE par le non-respect des traités précédents... mais ils reconnaissent la préméditation de l'agression et une planification très ancienne visant à détourner les sanctions : ce n'est donc pas un acte purement défensif... Ces opposants politiques sans autre pouvoir en France que de manipuler l'opinion sont-ils les "dindons de la farce" bridés par Moscou? Ont-ils compris le sens de cet ultimatum? Ils s'agacent et gesticulent pour devenir visibles comme des moucherons sur l'échiquier international: aucun d'entre eux n'est une pièce maîtresse et ne le sera jamais.
Poutine a pensé à tout et s'appuie sur des armes nouvelles et imparables. Son avantage militaire est certain et il doit absolument en profiter car c'est pour lui la bonne "fenêtre de tir". Mais "le maître des horloges" (et de millions de vies en suspens) prévoit-il la désescalade? Car penser la guerre exige aussi de PENSER la PAIX sinon c'est de la folie furieuse. Et que pouvons nous dire de POUTINE ENVISAGEANT LA PAIX? Quels signes précurseurs donnerait-il? S'il fait la paix comme il fait la guerre, il n'y aura pas de différence.
Personnellement, je l'imagine impavide comme une matriochka, avec la tête qui se dévisse brusquement pour laisser surgir un diable grimaçant à ressort. Je perçois chez lui les signes d'une schizophrénie, ce que confirme un discours populiste, inculte, méprisant et délirant "entre Hitler et Staline" visant à entraîner l'adhésion et la soumission. Pourrait-il simplement arrêter la guerre et réfléchir un seul instant sur la débâcle de plusieurs colonnes de ses chars, sur les bombardements des civils et l'exode, sur les menaces de famine et les ruines, sur son déficit en termes d'image personnelle et la dépréciation de sa signature, sur les coûts fabuleux en vies humaines et en matériel qui l'obligent à puiser dans ses stocks d'armes létales à longue portée pour continuer de raser l'Ukraine? Ses usines d'armements dissimulées sont au maximum de leur production. Le "bourreau de Marioupol" ne montre aucun sentiment, aucune faiblesse avouée, aucun regret: seule l'histoire semble pouvoir le jauger et le juger. ZEMMOUR prétend nous donner une leçon d'histoire et de réalisme en fustigeant les bonnes âmes effarouchées : "Admettez que vous n'y pouvez rien". Il oublie seulement les millions d'Ukrainiens qui se révoltent et se battent en pensant exactement le contraire: aucune guerre n'est gagnée d'avance.
Au contraire de Poutine, un autocrate stalinien au discours creux, le Penseur de Rodin représente un homme musculeux et nu, assis sur une pierre taillée, dans une posture méditative. Sa pensée est enracinée dans sa chair et dans la roche. Songeur, le menton posé sur le dos de sa main, ce temps de réflexion est le résultat d'une décision : je m'arrête et je réfléchis. Sa pensée semble ainsi prendre du poids et de la matière... (Plus exactement, la statue évoque le poète DANTE qui médite sur un de ses "Poèmes épiques", quand même la poésie était guerrière).
Dans un de ses essais, Martin BUDER évoque une fresque ancienne du palais communal de Sienne, tout autre: une femme nommée PAX représente la PAIX dans une attitude de méditation: elle s'est allongée nonchalamment en arrière sur un divan, le corps détendu et le coude droit replié en arrière, sa tête reposant délicatement au niveau de l'occiput dans la paume de sa main. Sa méditation est légère, le regard fixé en avant sur un point. Et cette allégorie gracieuse et blanche comme une statue grecque est encore plus intéressante que le Penseur de Rodin. La pensée ici est dématérialisée, concentrée dans le seul regard, qui n'a pas besoin de somatiser sa souffrance dans un corps: cette PAX Europa, entre toutes les allégories, est DISRUPTIVE, heureuse, féminine et spirituelle.
Et Martin Buder déroule sa pensée comme suit: "C'est précisément la profondeur de la crise qui nous permet de nourrir un espoir de paix. Il nous faut dénoncer l'absurdité du "point limite" et la folie de "la guerre nécessaire". Prenons garde: là ou s'arrêtent la parole et la confiance, commence la tuerie. La GRANDE PAIX (ou paix durable) n'est pas une simple pause entre deux guerres et n'est jamais acquise complètement. c'est une volonté constructive, un acte inédit et supérieur né de la réflexion. Le génie imaginaire de la PAIX, représenté sur cette fresque par une "femme pensante", amène quelque chose de bien plus grand et de plus puissant que la guerre".
PAX Europa n'est pas une guerrière et elle s'oppose dans sa posture à la déesse grecque Athéna qui, penchée sur son bâton, "semble réfléchir à la meilleure stratégie à adopter pour remporter la victoire" /Wikipedia. Elle s'oppose aussi au joueur d'échec calculant froidement plusieurs bombardements d'avance et donc à Vladimir Poutine, celui qui par ambition, ignorance et mépris veut faire de sa PAIX, la "Pax Russia" qu'il impose sous le poids des bombes, une victoire guerrière.
Car suffit-il de disposer des armes les plus létales du moment pour ouvrir et fermer les négociations ? Hitler avait les V1 et les V2, et pour quelle victoire? Poutine dispose de missiles supersoniques à charges conventionnelles ou nucléaires, ce qui relance la course aux armements. Avant 5 ans, il aura perdu sa suprématie militaire et le voilà obligé de pousser son avantage technique sans attendre.
En cas de refus par l'Ukraine de céder à son chantage (malgré les atteintes irrémédiables causées dernièrement), Poutine exécutera-t-il sa menace d'anéantissement des grandes villes historiques pour dissimuler son échec à ses compatriotes, tous complices et pressés d'en finir? Au mieux pour l'Europe, Poutine pourrait-il envisager la retraite de ses colonnes de blindés des territoires à l'ouest, comme Saddam Hussein quittant le Koweït (en enflammant tous les puits de pétrole conquis comme politique de la terre brûlée)? Non, incapable de s'arrêter pour penser à ses déconvenues depuis son expulsion du KGB et à sa déficience empathique, Poutine ne prévoit aucune inflexion des bombardements à venir car "sa défaite honteuse en tant que chef des armées n'est même pas envisageable", constatent ses généraux effarés... Ce qui est pourtant inéluctable à moyen terme: la défaite de tous les dictateurs est obligée face aux coalitions, aux intérêts divergeants, à l'usure du temps et à la maladie. Il lui faudrait être le Roi Soleil pour régner souverainement sur son peuple pendant 72 ans. Ce temps long n'est plus.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire